DOMAINE de SCEAUX - LA MAGIE du XVIIème siècle

JEUDI 13 MARS 2014

Les textes sont de Madame Dany AUBRY

Les photos sont de Madame Dany AUBRY & Monsieur COLOMBANI

C’est le printemps avant l’heure, temps idéal pour la visite de ce domaine dont les jardins sont le plus beau fleuron. Notre groupe se divise en deux. A tour de rôle, nous allons parcourir château et jardins, sous la conduite de guides passionnants. Un guide féru d’art qui va nous parler de l’histoire et des collections du château et une guide avec laquelle nous découvrirons les splendeurs du parc.

Trois châteaux se sont succédé sur cet emplacement depuis le XVème siècle. Le plus célèbre, « la Maison aux Champs » que Jean-Baptiste Colbert y fait édifier en 1670, idéalement situé entre Paris et Versailles. Ses constructions en U sont entourées de jardins dont l’aménagement est confié à Le Nôtre. Le fils de Colbert, le Marquis de Seignelay en hérité en 1683 et l’enrichit : bâtiments, nouveaux jardins. Le domaine passe ensuite au Duc et à la Duchesse du Maine en 1699, puis à leur neveu, le Duc de Penthièvre. Déclaré bien national en 1793, il sert d’école d’agriculture avant d’être racheté en 1798 par Jean-François Hippolyte Lecomte…. qui le fait raser en 1803.

 

Le château actuel a été reconstruit de 1856 à 1862 par le Duc et la Duchesse de Trévise en style néo-Louis XIII (brique et pierre).Le blason des Mortier de Trévise figure sur la façade. Leur petite-fille le cède au département de la Seine. Depuis 1937 il abrite les collections du Musée d’Ile de France. Il est aujourd’hui propriété du département des Hauts- de- Seine.

Les collections proviennent du Musée Carnavalet , de donations (Dunoyer de Segonzac, Fautrier …, d’acquisitions par mécénat, de dépôts de musées ou de particuliers.

 

Elles concernent autant la peinture que la sculpture, le mobilier, la céramique, les manuscrits, livres etc.…

 

Le musée est aussi un lieu de recherche sur l’histoire de toute l’Ile de France.

 

La « salle des paysages » expose des œuvres du XIXème siècle inspirées par la région et notamment par la Seine et la Forêt : Georges Michel (1763.1843), ses ciels sombres, sa technique audacieuse, ses paysages ressentis et Paul Huet (1783.1869) dont le romantisme annonce l’Impressionnisme, entre autres.

 

Dans une autre salle, une maquette nous permet de nous rendre compte de la grandeur et de la somptuosité de la demeure qu’avait voulue Colbert et où il fit travailler Perrault, Le Brun, Giraudot, Coysevox et Le Nôtre. Un bâtiment principal incorporant l’ancien château des Potier de Gesvres, deux ailes, plus loin des pavillons (dont celui de l’Aurore, toujours existant), des écuries, un abreuvoir à chevaux (toujours visible) 4 cours et les jardins.

 

Le fils de Colbert, Seignelay, va agrandir le domaine, demander à Le Nôtre de compléter le parc par un axe Est-Ouest qui coupe l’axe Nord-Sud de son père, construire une nouvelle orangerie qui servira de galerie pour ses collections. Le Duc et la Duchesse du Maine apportent peu de modifications mais y donnent des fêtes magnifiques. Le Duc est le fils de Louis XIV et de Madame de Montespan. Le Roi l’a richement établi : Grand Maître de l’Artillerie à 4 ans, il reçoit la Principauté des Dombes … que la Grande Mademoiselle a dû lui céder pour le prix de la liberté de celui qu’elle aime, Lauzun, et de son mariage avec lui. La Duchesse, elle, est née Bourbon-Condé, princesse du sang… et épouser un bâtard, fut-il fils du Roi Soleil, est pour elle une mésalliance. Pour la faire oublier, elle s’agite beaucoup et veut établir à Sceaux, autour d’elle, une véritable cour. Comédies (elle y joue elle-même), tragédies, opéras-ballets, se succèdent agrémentés d’illuminations et de feux d’artifices qui enchantent les « Nuits de Sceaux ». Elle est aussi une femme de science, passionnée d’astronomie. Un tableau de François de Troy la représente prenant une leçon de Nicolas de Malézieux. Le même de Troy ? Dans sa grande toile « le Festin de Didon et Enée » a donné ses traits à Didon et ceux du Duc à Enée. Elle rassemble autour d’elle quelques-uns des beaux esprits de son temps (« les Chevaliers de la Mouche à Miel ») préfigurant ainsi les salons littéraires qui fleuriront au XVIIIème siècle.

 

Les suites de la Révolution sont fatales au château. Mais le domaine tombe en héritage à Anne-Marie Lecomte, fille du négociant qui avait fait raser les bâtiments. Elle épouse le fils du Général Mortier, Le Duc de Trévise, et ils décident de faire construire leur demeure à cet emplacement en 1856. C’est le château actuel dont les dimensions paraissent un peu étriquées au milieu du vaste parc de Le Nôtre. Les guides l’ont baptisé « Moulinsart » !

 

Mais le Duc et la Duchesse de Trévise, passionnés d’histoire, se sont attachés à réhabiliter le domaine et à retrouver les perspectives. Dans une pièce, portrait du Maréchal Mortier, ainsi qu’un superbe parquet en marqueterie provenant d’une maison d’Asnières.

 

Revenant vers l’entrée, nous suivons une galerie où de belles céramiques et porcelaines attirent notre regard : ce sont des pièces de Rubelles et de Boissettes !

Nous voici maintenant dans les jardins. Depuis le terre-plein du château, la perspective se perd dans la brume. De ce côté, les jardins s’arrêtaient au bassin rond du temps de Colbert qui avait préféré un axe Nord-Sud. Les jardins de Le Nôtre sont des œuvres d’intelligence et de culture, offrant des surprises, prouesses de technique, un jeu entre les perspectives, les jets d’eau, les bassins, le ciel. Les broderies de la façade arrière du château ont été restaurées en 2013, selon les dessins de l’époque. Jusque là ce n’était que pelouse.

 

Nous partons pour « la ballade de Colbert », sur le côté du château, par l’allée de la Duchesse, en direction du jet d’eau. Ne manquent que les musiciens qui accompagnaient le Maître des lieux dans une allée adjacente …. Au bout de l’allée de tilleuls, un petit bassin, une cascade (refaite en1923 dans un style Arts Décos) et le grand bassin octogonal qui donne sur le Grand Canal….. invisible à notre droite, caché par un petit bois. Le grand jet d’eau monte à 28 mètres. Derrière, l’allée se poursuit et nous revenons vers le château dans les bois, peuplés de petites bêtes et d’oiseaux.

 

Les jets et les bassins sont alimentés par une réserve d’eau, paradis des grenouilles et autres tritons. Nous arrivons sous les parterres à broderies bordés par une ligne de cônes d’ifs qui datent de 1880. Nous revenons par une allée sinueuse, sous les arbres dont le feuillage, à la belle saison, garantit la fraîcheur et préserve les « surprises » de Le Nôtre. Nous croisons une autre allée aux bas-côtés couverts de narcisses.

 

Un retour en flânant vers les grilles de l’entrée du domaine, ornées de 2 groupes animaliers : une licorne terrassant un dragon, un dogue aux prises avec un loup, licorne et dogue symbolisant la fidélité et l’honnêteté, emblèmes choisis par Colbert.

 

Fin de la visite.

 

Un grand merci à Suzanne Colombani qui a beaucoup œuvré pour nous préparer cette belle visite et a même commandé le soleil !