Château de CHAMPS sur MARNE

Mercredi 4 février 2015

Les textes sont de Dany AUBRY

Photos des Amis du Musée et de Dany Aubry


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Nous voici, sous un soleil radieux mais … frisquet, prêts à faire connaissance avec cette charmante « maison de plaisance » qui vient de bénéficier d’une très récente restauration. 


Dépliant des Musées nationaux
Pour faciliter l'orientation
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VISITE du CHATEAU

Notre jeune guide passionnée sait faire passer son érudition avec beaucoup de gentillesse et d’humour.

La visite commence dans le salon de musique, au rez-de-chaussée. Sous nos pieds un beau parquet dit « de Versailles », signe de richesse. En effet, le bâtisseur de ce petit palais est riche : Paul Poisson de Bourvallois est l’un des financiers de Louis XIV. L’architecte Jean-Baptiste Bullet de Chamblain effectue les travaux de 1703 à 1707. Mais notre financier, comme beaucoup de ses pareils, a vite des ennuis, est arrêté et perd son château. Louis XIV le récupère et en fait don à sa fille (qu’il a eue avec Louise de La Vallière), la Princesse de Conti. Criblée de dettes, elle le cède à son cousin, le Duc de La Vallière, en 1718. Le duc et son fils, gens de goût, décorent leur demeure, font aménager un jardin à la française  par un petit-neveu de Le Nôtre, Claude Desgot.

 

La Marquise de Pompadour loue les lieux qu’elle occupera de 1757 à 1759.

 

Mais, à la Révolution, le domaine est saisi et pillé. Les jardins sont transformés en champs de luzerne, le grand bassin sert d’abreuvoir pour les bêtes.

Puis, plusieurs propriétaires se succèdent. L’un d’eux installe un jardin à l’anglaise.

 

En 1895, le banquier Louis Cahen d’Anvers se porte acquéreur du domaine. Lui et son épouse sont passionnés par le XVIIIe  siècle et ils s’efforcent de redonner à la propriété son aspect d’origine, tout en la dotant du confort de leur époque (chauffage, électrification). Le toit à la Mansart est restauré. Ils s’efforcent de remeubler dans le style XVIIIe mais y ajoutent  quelques mélanges de styles (Louis XIV, Régence, Louis XV et même XIXe). Henri-Achille Duchêne se charge de la restitution du jardin à la française, tout en conservant le chaque côté, le parc à l’anglaise.

Louis donne le château à son fils Charles en 1928.  En 1935, ce dernier, sans doute touché par la crise de 1929, et inquiet des rumeurs de guerre et d’antisémitisme venues d’Allemagne, le cède à l’Etat.  Plus heureuse que leurs cousins de Camondo (une fille Cahen avait épousé un Camondo) la famille, réfugiée en Argentine échappera en majorité aux persécutions nazies.

  

De 1958 à 1968, le Général de Gaulle recevra à Champs les chefs d’état africains, moyennant une rénovation des cuisines et des salles de bains.

Les « Maisons de Plaisance » du XVIIIe étaient moins conçues pour le paraître que pour l’agrément et le confort. Ainsi, l’escalier d’honneur est décalé afin de permettre, dès l’arrivée dans l’entrée, une vision sur les jardins. Les pièces sont distribuées de façon à faciliter le service et le confort.

Les entresols sont destinés, au 2ème étage, aux enfants et à leurs nurses. Au 1er et au rez-de-chaussée à la lingerie et aux domestiques. Cela permet de mieux chauffer des pièces dont le plafond est moins haut. 

 

Au premier étage, un couloir recouvert d’une tapisserie d’Aubusson dite « verdure » donne accès à une grande chambre aux belles boiseries, avec sa salle de bains attenante et un boudoir. Les salles de bains ont été installées par les Cahen d’Anvers dans les anciennes « garde-robes ».  Chacun dispose d’un petit appartement, qui permet de ménager son intimité et son autonomie. Dans le Salon, un tableau représente les animaux de la ferme. Au XVIIIe, le domaine comportait une ferme. Le pigeonnier pouvait accueillir 600 pigeons, ce qui indiquait une propriété de 600 hectares. Les Cahen d’Anvers en ont récupéré 110 et actuellement, il en reste 85.  Une pendule du XVIIIe orne la cheminée. Un petit cordon, le côté, permettait de la faire sonner la nuit lorsqu’on le souhaitait (et pas sans arrêt !). De magnifiques porcelaines de Meissen, de Chine, complètent les décors. Dans la chambre d’honneur, les boiseries sont du plus beau style Rocaille, avec la coquille Saint Jacques dentelée, un magnifique paon et des guirlandes.  Dans un coin, un très joli petit « bonheur du jour » marqueté de Charles Topino représente des objets du quotidien : tasses, encrier, plume, lettres, jeux de cartes … motifs imités des paravents chinois en laque de Coromandel.  La chambre bleue est entourée d’exquises boiseries en camaïeu de bleu.

 

Au rez-de-chaussée, le Grand Salon, destiné à impressionner les visiteurs, est garni de miroirs dorée, d’œuvres d’art collectionnées par les propriétaires (fonts baptismaux italien du Vie siècle, fauteuils de différents styles). Une curieuse petite table dite «table  à en cas» s’ouvre par le dessus pour permettre d’y ranger tout ce qu’il faut pour un pique-nique…. En réalité, cette table, provenant des appartements de Louis XVIII à Marly était …. Une « chaise d’affaires » à laquelle on a ajouté des pieds !

Le fumoir n’existait pas au XVIIIe. Charles Cahen d’Anvers le fait aménager. Les boiseries décapées, les fauteuils et canapés « confortables » en font une pièce chaude et accueillante, réservée aux  hommes.  Le lustre a été dessiné par Boulle (il en existe très peu). Un portrait de Louis XV, retrouvé dans les greniers est une copie de Van Loo. Un très beau vase Imari du Japon, une tapisserie représentant l’Empereur de Chine Kanqxi en compagnie de cinq jésuites, scientifiques et artistes reçus à la Cour, une bibliothèque XIXe pleine de livres rares, aux armoiries royales, un bureau estampillé « Cressant », complètent cette pièce qui donne sur un billard à la française.

Le Salon qui suit est une ravissante pièce décorée de « chinoiseries » par Christophe Huet pour le Duc de la Vallière. Le décor, très amusant, représente des chinois se livrant à des activités tout à fait européennes ! chassant l’autruche, jouant au volant etc…et les tapisseries des fauteuils illustrent les Fables de La Fontaine et datant du XVIIIe.

Cette pièce a subi l’attaque d’un mérule qui a fait s’écrouler le plafond …. Heureusement le décor était peint sur toile ! Les tissus ont été refaits approximativement, sauf l’un d’eux, en soierie de Lyon, dont les cartons avaient été conservés.

Cette maison de campagne comportait une salle à manger (inexistante dans les grands châteaux de l’époque). Carrelage, dessertes de marbre, flanquées de rafraîchissoirs, au dessus des portes, tableaux de Desportes et Oudry représentant des animaux.

Les enfants avaient aussi leur salle à manger, aménagée dans l’ancienne salle de bains de Madame de Pompadour, au décor de stuc. Elle fait suite au couloir des domestiques garni de grands buffets contenant le service de tables des Cahen d’Anvers, « l’orgue des délices « . Le service de verre  en cristal et le tableau d’appel du personnel (200 domestiques aux époques fastes !)

C’est là que se termine cette visite d’une demeure « Conte de fées » à dimension humaine… on y vivait bien !

Un petit tour dans les jardins, malgré le vent frais, puis, pour se réchauffer un bon chocolat à la Brasserie du coin.

Un bel après-midi !